Pas une affaire d’âge, une question de mer.
En reprenant le large après un si long hivernage, le gréement de la frégate a besoin de soins. De soins continus, constants… Comme une vieille dame qu’elle n’est pas.
Ce mardi après-midi de soleil, alors que nous tentons de gagner de l’ouest pour surfer les vents d’est escomptés pour « bientôt » et remonter vers Cherbourg, un ordre est tombé du ciel. « Gréement trop mou, ridage pour tout l’monde !
Le tiers de renfort est aussitôt tiré des bannettes et ceux qui étaient de quart requis sur le pont après l’heure de leur relève : chacun son mât. Pour se donner sur cœur à l’ouvrage, forcément, on essaie de faire plus vite que les copains, le Bosco veillant au grain, et les haubans gros comme le poignet sont re-ridés en symétrique, de part et d’autre de chaque mât, un par un.
Bosses, caliornes, palans à chaînes, winchs espagnols, tours de cabestan et nœuds d’amarrage plat… une sorte de frénésie prend l’équipage. Sous le gaillard d’avant, il ne reste plus un maillet ni une aiguille de bosco. On s’invective, on se passe les outils, on s’invente une routine… Les tiers se démultiplient, d’autant plus efficace que personne ne sera libéré avant la tâche achevée !
Avant la nuit, tous les haubans étaient ridés.
Sandrine