Le Grand Carénage de L’Hermione, cette réplique emblématique d’une frégate du XVIIIe siècle, se poursuit au port de Bayonne ! Afin de parfaire les diagnostics et de poursuivre la restauration nécessaire sur la structure du navire, nous avons débordé la partie basse des œuvres vives.
Mais pourquoi déborder et comment cela se passe-t-il ? Voici un aperçu des coulisses de ce chantier hors norme.
Le débordage : une étape primordiale pour la pérennité de la restauration de L’Hermione
Le débordage consiste à démonter les bordés du navire. Les bordés, ce sont en quelque sorte les pièces de bois qui constituent la “peau” du navire. Ces grandes planches de chêne, d’une épaisseur variant de 7,4 à 16,2 cm et pouvant atteindre jusqu’à 13 mètres de long, protègent la coque et assurent son étanchéité. Elles sont fixées sur les couples (les “côtes” du navire).
Afin de confirmer le diagnostic et poursuivre le traitement des fonds, nous avons procédé à un débordage des “œuvres vives”, c’est à dire la partie immergée de la coque (par opposition aux “œuvres mortes”, terme qui désigne les parties de la coque au-dessus de l’eau), et plus précisément le retrait des 11 virures les plus basses depuis la quille.
En plus de faciliter l’accès aux autres pièces structurelles des fonds, cela permet également de ventiler et de traiter plus facilement les zones humides.
Comment déborder : zoom sur le retrait des carvelles
Pour retirer les bordés, il faut extraire les carvelles et les boulons en bronze qui reprennent les vaigres, les membrures et les bordées.
Les carvelles, ce sont des grands clous en bronze à corps et tête carrés. Cette opération est minutieuse, afin d’extraire les carvelles sans arracher de bois, et donc préserver au maximum les bordés.
Techniquement, le retrait des carvelles est réalisé en trois étapes :
- Mise à jour des tapons : chaque carvelle est masquée par un tapon, un bouchon de bois qui doit être soigneusement dégagé pour accéder à la tête du clou.
- Perçage et taraudage des carvelles : une fois le tapon retiré, la carvelle est percée et un filetage est réalisé dans le trou pour permettre son extraction sans abîmer le bois environnant et sans que la carvelle ne se casse lors du retrait.
- Extraction des carvelles : à l’aide d’une vis insérée dans le filetage et d’une masse à inertie, les carvelles sont extraites avec précaution pour éviter – autant que possible – de casser les clous, auquel cas on doit reprendre à l’étape 2 pour s’assurer d’enlever proprement tout reste de carvelle.
Et on répète l’opération : on a retiré plus de 3 600 carvelles pour déborder. Nous vous laissons donc imaginer le temps nécessaire !
Une fois les carvelles d’un bordé enlevé, on peut donc le désolidariser des membrures, et passer au diagnostic et au traitement.
Entretien des bordés après dépose
Seuls les bordés abîmés seront remplacés. La majeure partie des bordés en bon état sera remise en place, mais pas avant d’avoir subi un processus de rénovation minutieux.
- Décapage thermique : à l’aide d’un chalumeau, l’ancienne couche d’antifouling est soigneusement retirée.
- Grattage et ponçage : chaque bordé est nettoyé sur ses six faces pour mettre le bois à nu et inspecter son état général.
- Traitement antifongique : pour prévenir toute dégradation future, un produit antifongique est appliqué sur les bordés.
- Application d’apprêt et stockage : deux couches d’apprêt sont ensuite appliquées pour protéger le bois, et les bordés rénovés sont stockés dans des conditions optimales pour éviter qu’ils ne gercent ou perdent leur étanchéité.
Le débordage de L’Hermione est une opération complexe qui illustre les efforts déployés pour garantir la sauvegarde de cette frégate emblématique d’un patrimoine maritime vivant, grâce à l’expertise des charpentiers, des marins professionnels et au travail & l’engagement des bénévoles de l’association !