Peux-tu te présenter ? Qui es-tu ?
Bonjour, je m’appelle Antonin Martineau, je suis sculpteur sur bois, Meilleur ouvrier de France (MOF)
Je me considère comme Artisan d’Art : je suis à mi-chemin entre l’artistique et l’artisanat.
J’ai une double formation : plutôt une formation de base qui est axée sur l’ornement et après, j’ai une autre casquette : la sculpture « statuaire », c’est la sculpture autour du personnage et de l’animal, et ça c’est plutôt la sculpture que j’aime vraiment faire.
Ta première rencontre avec le Lion de L’Hermione ?
Mi-février 2024, je suis venu à Anglet sur le chantier naval, et là, j’ai vu l’état du Lion.
Ça a été la première phase de travail, avec derrière un processus de dire : « voilà, moi j’interviens sur tant de jours de travail, en tant d’étapes ».
La grosse question était de de se lancer sur un projet sans avoir de certitude de « qu’est-ce qu’il y avait à l’intérieur [du lion] ».
Quand a démarré la restauration du Lion, la figure de proue de la frégate L’Hermione ?
Tout début juillet 2024, je suis arrivé [au chantier de restauration de] L’Hermione, j’avais analysé toute une zone qu’il fallait qu’on enlève, j’ai donc j’ai pris ma tronçonneuse, et j’ai commencé à découper.
J’avais estimé 3 jours, effectivement, on a passé 3 jours pour curer et nettoyer. Et en fait on a enlevé 1/3 de bois sur le Lion.
Peux-tu nous décrire l’étape de la greffe, après le curage ?
Suite au curage, ce sont les charpentiers de marine de L’Hermione qui ont pris le relais.
Eux, ils ont regénéré des plateaux de bois pour refaire un multicouche de pin, de la mi-juillet jusqu’à la mi-août, jusqu’à ce que moi je revienne sur L’Hermione.
Quand je suis revenu debut août, le Lion était prêt à être collé, les plateaux étaient prêts.
On a recollé tous les plateaux en 2 étapes. On travaille à [la colle] époxy, il faut qu’elle soit pressée en moins d’une heure, parce que sinon elle commence à prendre.
Donc dans l’heure où on commence à coller, il fallait que 1 heure après pile poil, que tous les serre-joints soient posés et pressés.
C’était des moments assez sportifs, mais chouette en termes d’ambiance de travail, parce qu’il y a une espèce de symbiose à se mettre ensemble avec les partenaires de travail.
Cette phase de collage, ça nous a repris 3 jours, parce qu’il faut considérer tous les temps de séchage entre chaque collage. J’étais arrivé le lundi matin, du coup le jeudi matin, la sculpture, elle était prête à sculpter.
Comment as-tu travaillé pour la sculpture de la partie restaurée ?
La première étape, ça a été de mettre le Lion couché sur le dos, avec le visage la face vers le haut, pour justement avoir une notion de volume et de symétrie, à la tronçonneuse et avec mon œil, et principalement un réglet et un compas.
C’est clair qu’on ne travaille pas de manière historique, par rapport à la sculpture du 18e siècle. Ça permet quand même d’être beaucoup plus efficace que de tout faire à la gouge.
As-tu rencontré des difficultés particulières sur cette restauration ?
La grosse difficulté de ce genre de chantier, c’est qu’on vient rapporter du bois neuf sur une sculpture ancienne, et il faut resculpter ce bois neuf, en donnant l’impression que ce bois neuf n’a jamais été rapporté.
En fait, il faut qu’une fois peint, le Lion il ait l’air identique, qu’on n’ait pas l’impression qu’il y a une restauration.
C’est quoi la suite ?
Je reviendrai forcément au moment où la figure de proue sera regrutée sur le bateau, j’aurai des petits raccords de sculpture à faire… Je me suis aussi proposé pour faire [la dorure à] la feuille d’or sur le blason.
J’ai envie de revenir et de continuer à partager cette expérience et cette aventure avec toute l’équipe.
Connaissais-tu déjà L’Hermione ? Que retires-tu de cette expérience ?
L’Hermione, je connais depuis que je suis tout petit, parce que je suis originaire du Poitou-Charentes.
Ça a été a été un gros coup de cœur pour l’association [Hermione – La Fayette], pour les gens sur place, l’ambiance avec les bénévoles, l’ambiance sur le chantier, l’accueil qui a été réservé… Le fait de dormir sur le bateau, de pouvoir profiter du lieu, c’était aussi une expérience assez chouette !
J’aime beaucoup l’univers de la mer, j’adore la sculpture, faire converger deux de mes passions, et du coup j’ai envie que ça continue…
(rires) Je sais pas comment faire, mais revenir en tant que bénévole [Hermione], je l’espère, et puis en tant que gabier de L’Hermione aussi, si c’est possible sur le long terme, quand L’Hermione reprendra la mer ?
Propos recueillis en novembre 2024 & retranscrits par Myriam Emile, pour l’association Hermione – La Fayette.